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 Mais de lettres vous n'avez que les trois...

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AuteurMessage
Hélène
Consul [MODERATEUR]



Nombre de messages : 106
ResPublica Nova : Président de l'association
Date d'inscription : 25/04/2005

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MessageSujet: Mais de lettres vous n'avez que les trois...   Mais de lettres vous n'avez que les trois... EmptyJeu 3 Mai - 22:02

... qui forment le mot UMP ?!

Regardez ce que l’on peut lire au détour d’une entrevue avec Nicolas Sarkozy, dans l’édition de « 20 minutes » du 15 avril
propos recueillis par Frédéric Filloux, David Carzon et Stéphane Colineau. Pour voir l'entretien dans son ensemble : http://www.20minutes.fr/article/151848/20070416-France-Le-Pen-ne-m-interesse-pas-son-electorat-si.php


Grand balayage sur le programme ; du chômage on en vient à l’éducation, et l’on peut lire les lignes suivantes :

Vous vous fixez comme objectif de ne laisser aucun enfant sortir du système scolaire sans qualifications. Comment comptez-vous parvenir à cet objectif ?

Par exemple dans les universités, chacun choisira sa filière, mais l’Etat n’est pas obligé de financer les filières qui conduisent au chômage. L’Etat financera davantage de places dans les filières qui proposent des emplois, que dans des filières où on a 5000 étudiants pour 250 places.

Si je veux faire littérature ancienne, je devrais financer mes études ?

Vous avez le droit de faire littérature ancienne, mais le contribuable n’a pas forcément à payer vos études de littérature ancienne si au bout il y a 1000 étudiants pour deux places. Les universités auront davantage d’argent pour
créer des filières dans l’informatique, dans les mathématiques, dans les sciences économiques. Le plaisir de la connaissance est formidable mais l’Etat doit se préoccuper d’abord de la réussite professionnelle des jeunes.

Je sais bien qu’en matière de potentiel électoral, le public des professeurs de lettres classiques ne représente pas une niche considérable, mais tout de même, une telle réflexion laisse un peu pantois.

On peut légitimement s’inquiéter de la place qu’occupent les lettres dans le projet politique et social de celui qui va probablement être élu à la tête de la France à la fin de la semaine.

J'ai peur que ces réactions ne révèlent chez Nicolas Sarkozy une conception matérialiste du savoir, assez éloignée de ce que l’on appelle un esprit de culture au sens noble du terme, qu’il me chagrine de voir disparaître du paysage politique français.

Je traduis. Faire des lettres, c’est émouvant pour la beauté du geste, mais ça ne remplira pas la marmite, c’est une perte de temps, un gaspillage d’argent et d’énergie que l’Etat n’a surtout pas à encourager.

Oui, il y a un problème de débouchés, et à ce jour quand vous avez une maîtrise de philo, vous êtes plutôt embarrassé sur le marché du travail. Oui, je pourrais m’adonner à une nouvelle déploration sur l’état des filières littéraires, mais le problème est à mon sens plus profond que cela.

On ne demande pas utopiquement un gigantesque plan d’embauche pour les étudiants en sanskrit ; mais on se doit de dénoncer cet état d’esprit qui entretient la sclérose des études littéraires, dont les hommes politiques « modernes » ont décidé une bonne fois pour toutes qu’elles ne servaient à rien.

Voilà qui nous promet de belles générations nourries au lait de l’informatique et de la technique, je ne dis pas incapables de parler correctement le français, mais surtout dépourvues de ce supplément d’âme qui fait la véritable valeur d’un collaborateur d’entreprise. Cela, est-on capable de le comprendre ?

C’est typiquement ce qui s’appelle un modernisme mal compris. Les directeurs de ressources humaines vous le diront, ceux qui fréquentent d’un peu près les milieux anglo-saxons vous le confirmeront, on n’a jamais tant senti qu’aujourd’hui combien forte était la carence en esprits libres, critiques, capables de prendre de la distance par rapport aux problèmes techniques qu’ils ont à traiter, pour insuffler à leur travail une vision humaniste. Et cela, c’est l’étude des lettres qui le permet.

Au moment où l’on déroule un tapis rouge dans les écoles de commerce aux élèves issus de filières littéraires, M. Sarkozy nous annonce que l’avenir est aux techniciens dont le plus grand titre de gloire sera d’avoir programmé leur calculatrice en mode stat. Ce n’est pas la première fois que les élites politiques françaises sont à côté de la plaque : nous venons de créer la Paris School of Economics, sans vouloir se rappeler qu’en face son brillant modèle, la London School of Economics, accueille en son sein davantage d’historiens, philosophes et sociologues que d’économistes. Et l’on peut faire confiance aux universités américaines pour faire des ponts d’or aux lettreux français, parce que là-bas, malgré l’arriération culturelle que notre orgueil français se plaît à coller sur le front des Yankees, on sait qu’un projet économique puis politique repose substantiellement sur une vision de la société qui se construit par l’esprit et la langue, et qu’un passage par le latin n’a jamais handicapé un bon manager qui ira faire un tour à l'Institut Caton.

C’est la même mentalité qui fait que l’on a supprimé la philosophie du droit pour les jeunes étudiants en droit, qui deviendront des professionnels du code désarmés devant des situations qui demanderont de la hauteur de vue, et un enracinement anthropologique solide.

C’est la même mentalité qui fait qu’aujourd’hui de plus en plus de chercheurs du vivant n’arrivent plus à prendre de la distance par rapport au matériau scientifique objet de leur étude, car on a oublié de leur dire ce que c’était qu’un homme et ce que c’était que la vie.

La dignité d’une société en construction est inséparable de la reconnaissance des valeurs que véhiculent les études littéraires, qui plus
que jamais doivent se faire entendre pour ce qu’elles sont : non un
passe-temps scholastique pour intellectuel déprimé, mais un gigantesque
réservoir de valeurs au service de l’homme et du bien commun.
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