Vous avez dû apprendre par la presse l'autonomisation de l'Andalousie, devenue, comme la Catalogne, une province autonome. Or, si la Catalogne est une des provinces les plus riches d'Espagne, sinon la plus riche, et que l'Andalousie est une des provinces les plus peuplées d'Espagne, sinon la plus peuplée, on peut dire que l'Espagne est apparemment très affaiblie par cette autonomisation systématique, d'autant plus affirmée par le premier ministre Zapatero qu'il met un point d'honneur à faire disparaître tout ce qui symbolise l'ère franquiste.
Alors, il est vrai que l'Espagne ne peut pas être lue comme la France, et que la France fait des excès en centralisation, malgré les velléités récentes, là où l'Espagne fait des excès en autonomisation.
Mais la question plus importante est celle de cette fameuse Europe des régions. En effet, nous sommes tous conscients que l'Europe se fait contre les nationalismes et l'exaltation des identités nationales. Mais que ne fait-elle pas pour exalter de nouvelles identités nationales, cachées derrière le mot de "région", qui sont subventionnées, qui sont choyées parce qu'elles affaiblissent les Etats, dont les noms renvoient, pris de manière identitaire aux conflits mondiaux. Car il est sûr que personne de croit au danger pour l'Europe de l'Andalousie, alors que tout le monde croit au danger pour l'Europe d'une France ou d'une Allemagne identitaire.
Alors, regardons les choses en face :
- nul ne sait ce qui peut se passer au pays basque, mais tous sentent que le problème sera résolu en Espagne, et que son autonomisation à terme, quand la violence aura disparu, entraînera le pays basque français dans la tourmente.
- la Corse, nous le savons bien, deviendra au moins plsu qu'autonome dans les années à venir.
- la Belgique, nous le savons, compte ses jours. La séparation en Wallonie et en Flandre est imminente.
- la Yougoslavie, que l'Union Européenne a été incapable, comme par hasard, de gérer lors des conflits interethniques, a volé en éclats. Le Monténégro est indépendant. Le Kosovo risque bien de le devenir
- la Macédoine reste un exemple d'exaltation régionale des nations.
- l'Ecosse souhaiterait encore plus d'autonomie et n'exclue pas l'indépendance
Je cite là les cas les plus sérieux, des cas très sérieux.
Alors, le problème devient le suivant : ou bien on est europhile, et on devrait s'inquiéter sérieusement de cette explosion des identités, car, au-delà du cynisme qui consiste à affaiblir les nations traditionnelles, il faudra assumer le blocage à terme des institutions devant l'éparpillement des intérêts ; ou bien on est eurosceptique, et on doit s'inquiéter de l'incapacité de l'Europe à penser l'avenir des peuples, son incapacité à gérer le principe de la nationalité, et donc celui de l'identité, celle des autres, partant, la sienne propre.
Cela confirme l'idée qu'à Bruxelles se noue un projet, qui, pour ne pas être idiot, est totalement dépourvu de réalisme politique et de pensée élaborée de la culture comme fondement de la communauté politique. A moins que l'on ne prépare, à notre corps défendant, à travers l'Europe, une Europe impériale, et non démocratique, qui consisterait à arbitrer entre des peuplades éparpillées, qui prêtent allégeance à Bruxelles...